Alpha Condé et Alassane Ouattara étaient les médiateurs de crise sociopolitique qui a secoué le Togo de 2017 à 2018. Une médiation tronquée qui a enterré les revendications et les espoirs des milliers de togolais descendus dans la rue pour réclamer le changement. A la lumière du cirque organisé en Guinée et en Côte d’Ivoire, on comprend mieux aujourd’hui les vrais objectifs de leur mission au Togo à l’époque.

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D’août 2017 à décembre 2018, le Togo a traversé une crise sociopolitique majeure. Malgré la volonté des manifestants de voir Faure Gnassingbé quitter le pouvoir, l’héritier du 05 février 2005 a réussi à se maintenir et même à briguer un quatrième mandat, deux ans plus tard.

Pour arriver à cet épilogue inespéré de cette crise sans précédent au Togo, le chef de l’Etat togolais a pu compter sur la solidarité de certains de ses pairs de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).

En effet, alors que la crise s’enlisait et que la seule issue possible selon les leaders de l’opposition était le départ de Faure Gnassingbé après plus de deux mandats à la tête du pays, certains chefs d’Etats se sont proposés en médiateur. C’est le cas du Guinéen Alpha Condé et de l’Ivoirien Alassane Ouattara. Tous les deux ont usé de leurs stratèges pour, dans un premier temps mettre un terme aux manifestations, pour ensuite, dans un second temps, permettre à Faure Gnassingbé de reprendre la situation en main.

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Les opposants togolais à contribution malgré eux…

En effet, à la suite d’un voyage du président togolais en Guinée le 10 octobre 2017, Alpha Condé, alors président en exercice de l’Union africaine, s’est posé en porteur de paix au Togo volant la vedette au Président Ghanéen Nana Kufo Addo qui avait été désigné par la CEDEAO. C’est ainsi qu’il a contacté les leaders de l’opposition pour tenter de trouver, avec eux, des solutions de sortie de crise. Et déjà à l’époque, certains observateurs soupçonnaient le président guinéen d’être un renfort de Faure Gnassingbé.

Mais que nenni. Les opposants togolais lui vouaient une certaine confiance croyant avoir affaire à un ancien opposant. Mais c’est sans compter sur la duplicité de ce dernier. Alpha Condé va réussir à casser la dynamique de l’opposition togolaise en leur demandant de surseoir aux manifestations. Les médiateurs, avec Condé en pôle position, avaient demandé aux leaders de l’opposition de « surseoir aux manifestations de rue » annoncées sur toute l’étendue du territoire nationale et de « lui donner une semaine pour prendre attache avec le gouvernement pour comprendre et régler ce qui fait l’objet de frustrations au niveau de l’opposition ». Après cet épisode, l’opposition ne réussira plus jamais à remobiliser les populations.

Et pendant qu’Alpha Condé réussissait la mission à lui confier, Alassane Ouattara plus discret dans la médiation bataillait sur un autre front. En effet, la crise de 2017 a mobilisé une partie importante de la diaspora togolaise. Du Nigeria au Sénégal en passant par Paris, l’image de Faure Gnassingbé a été écorchée.

Pendant ce temps également, le président ivoirien, selon de sources dignes de foi, arpentait les coulisses pour trouver des appuis diplomatiques à homologue du Togo en détresse. Il s’agit principalement de certains chefs d’Etats de la CEDEAO qui ne voyaient pas, d’un très bon œil, la situation qui prévalait au Togo. Et en vieux roublard de la politique africaine, Ouattara a, lui aussi, réussi à enfumer les quelques alliés de l’opposition togolaise.

Pour ne rien arranger, au moment où les deux dirigeants étaient sur le point de conclure leur « stage» au Togo, les leaders de l’opposition vont eux-mêmes se donner le coup de grâce. En effet, l’opposition qui était jusque-là unie va voir resurgir ses vieux démons. Aux suspicions de corruption se sont ajoutées les velléités de départ de certains leaders qui ont mis à rude épreuve la coalition qui a tenu tête au régime pendant plusieurs mois. Elle finira par disparaître.

Et c’est seulement, quand les recommandations de la CEDEAO issues des pourparlers seront vidées de leurs substances avec l’organisation des élections législatives et la réforme constitutionnelle taillée sur mesure pour permettre à Faure Gnassingbé de postuler et de décrocher un quatrième mandat, que l’opposition va se rendre compte de la supercherie.

Au finish, malgré elle, la classe opposante s’est faite avoir comme des débutants en politique alors que les principaux médiateurs avaient une autre idée précise dernière la tête depuis le début. Celle de tracer leurs routes vers un troisième mandat. Et l’opposition togolaise a contribué grandement en leur débroussant la tumultueuse route du troisième mandat.

Le boulevard ouvert Condé et Ouattara…

Après leur tour de passe-passe au Togo, Alpha Condé et Alassane Ouattara peuvent alors dupliquer le même processus dans leur pays respectif. Pour ce faire, ils n’ont pas hésité à jouer des subtilités juridiques pour obtenir une rallonge au pouvoir. D’abord pourfendeur un temps des tripatouillages constitutionnels, ces deux dirigeants vont finir par adopter la technique de ceux qu’ils auront politiquement combattus pendant plus d’un quart de siècle. Ni les pressions diplomatiques, ni celles de la rue, encore moins celle d’une opposition divisée n’ont découragés Condé et Ouattara.

Pour arriver à leur fin, les deux dirigeants ont fait appel à la recette togolaise : changement de constitution, verrouillage des institutions, répressions de toutes contestations avec une violence inouïe et blocage systématique de toutes les activités de l’opposition.

Après analyse, il est évident que l’opposition togolaise aurait pu briser le rêve maléfique de Condé et Ouattara, devenu depuis lors une réalité, si elle s’était montrée plus incisive, imprévisible et surtout unie pour remballer le duo Condé et Ouattara.

Aujourd’hui, pendant que Faure Gnassingbé continue la perpétuation du legs de son père, Alassane Ouattara et Alpha Condé sont en train de contraindre leurs peuples à avaler l’amère pilule.

Source : Fraternité

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