« Il y a souvent plus de stupidité que de courage dans une constance apparente ». Dans Emile ou l’Education Jean-Jacques ROUSSEAU trouve dans les hommes une inépuisable richesse à inventer, à créer, à innover, à agir au point qu’il déplore la paresse de l’esprit et les petitesses insoutenables à se cantonner à la robotisation du réflexe. Ceux qui souffrent d’une inspiration rasée n’ont jamais une intelligence adaptative qui facilite l’évolution de leur personnalité et leur progrès dans le temps.
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Au regard de l’histoire de sang qui se répète dans notre pays pour gorger nos terres de tragédie, on est en droit de se demander s’il n’y a pas une faiblesse conceptuelle de l’Etat à penser que l’autoritarisme fait l’autorité. Depuis un demi-siècle, notre pays gémit sous un voile de barbarie continue sans un souffle de répit qui libère les énergies à s’occuper des problèmes sociaux, environnementaux, économiques, culturels…La normalité de l’Etat à s’engager pour le bien-être des populations, leur cadre de vie, la sécurité des personnes et des biens ne semble pas être envisagée si l’on suit l’accoutumance aux effractions, à la rapine et au terrorisme d’Etat qui a pris une envergure spatio-temporelle dans la gestion des affaires publiques.
Sous Eyadéma, pendant trente-huit (38) ans, la ritournelle de la guerre civile est le spectre de référence de celui dont la générosité n’a accouché qu’une armée clanique, ethnique engluée dans le flux des massacres des populations civiles sans défense. Le même schéma de legs est dans une reproduction du fils qui se couvre d’un folklore de réconciliation à taux zéro de sursaut éthico-civique, moral, patriotique et humain.
Dans un simulacre de sollicitation de la Communauté sous-régionale pour une normalité de la gouvernance, le fils du père, le « Timoniertricule » qui vivait mal l’insurrection diagonale de toute la communauté nationale, croit avoir trouvé un subterfuge pour contenir la rage nationale contre son pouvoir. Il sombre à nouveau dans le cycle de la répression dès que le peuple se met à la disposition de la CEDEAO pour un règlement pacifique de la crise togolaise.
Au lieu de se soumettre aux exigences de la feuille de route de la CEDEAO, le feu de la répression par lequel ce régime se berce d’illusion de puissance resurgit avec un nouvel Etat de siège gratuitement suscité dans le Nord du pays et plus particulièrement à Sokodé.
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Le cumul d’une licence comportementale du Palais de Kégué qui défie la CEDEAO et se réorganise dans une orchestration des représailles contre les Togolais ne donne-t-il pas un fouet à la conscience patriotique ?
Faure, peut-il se moquer de la puissance régionale, ses ordres et sous-estimer un autre réveil frontal des Togolais ?
Le rejeton d’Eyadéma veut-il, comme son père survivre de la crise en ouvrant un nouveau chapitre de résistance par la répression, la violence, le crime ?
1) La marche à reculons d’un « Palais de la paix »
Tous les potentats sont des fossoyeurs de leur propre régime. Leur volonté de puissance les livre à la violence, aux crimes, aux massacres, aux transgressions autoritaires qui développent chez les populations un chagrin collectif dont elles parviennent toujours à trouver les inspirations les plus incisives et vertueuses en vue de leur libération. Ce qui signifie qu’une dictature n’est surtout pas un régime stable. Elle vit dans une insécurité permanente à mesure qu’il martyrise le peuple. Comme elle ne pense qu’à sa survie, elle s’écarte royalement des impératifs sociaux et les fondamentaux du vivre-ensemble.
Ce déphasage des attentes du peuple lui creuse inexorablement une sépulture latente et indécente.
Le retard de notre pays sur l’échiquier régional s’explique par l’esprit de la gouvernance qui refuse de se dialectiser à la modernité démocratique et s’ouvrir à l’épanouissement du citoyen. Les gonflements propagandistes ne cachent certainement pas l’affaissement rebutant de notre République, les moisissures dégoutantes de nos communes, villes, préfectures, régions dans un plantureux lasser-pour-compte.
Si on évaluait dans un léger calcul ce que le « Timonier » et le « Timoniertricule » ont investi en cinquante et un an pour leur propre sécurité au détriment de la construction d’un Etat de droit et des projets sociaux, la foudre du vertige précipiterait beaucoup de nos compatriotes dans une explosion des maladies cardio-vasculaires. Le paradoxe de la dictature réside dans son incapacité à être stable, à se mettre en sécurité et à mettre en sécurité la vie de la collectivité nationale. Le duel permanent qu’elle suscite avec les forces vives de la nation n’offre aucune tranquillité à elle, ni aux populations. L’angoisse existentielle est si forte autant chez les citoyens que chez les potentats. Mais les jeux sont faits lorsque les masses populaires délibèrent sur leur présent et leur avenir à partir du choix qui résulte de cette question de Jean-Paul Sartre dans L’Etre et le néant, « Rester esclave ou risquer le pis pour s’affranchir » ?
Quoi qu’on dise, les Togolais ont entièrement dépouillé Eyadéma de tout, prestige, crédibilité, honneur avant de le laisser à la mort. Son fils, lui, à une époque autre en ses mœurs, veut gouverner en reproduisant les dérives désuètes de son père. L’enferment est une prison de l’esprit. Il croit feindre avec l’APG, la CVJR et la feuille de route de la CEDEAO. Il n’a pas assez de claivoyance pour comprendre qu’en politique, le petit mot « je le ferai » a renversé des trônes, a ruiné des dignitaires, a mis en quarantaine des chefs. Faire attendre les réformes accroît l’insécurité du Palais autant que la répression criminelle. Les considérations, les égards, les honneurs s’étiolent et disparaissent partout où l’ « homme simple » se présente. Quel togolais peut être heureux de voir le Chef de l’Etat dans une posture d’humiliation sans répit ?
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Montesquieu, dans Mes Pensées, soulignait à juste titre « Un fond de modestie rapporte de très gros intérêt ». La solitude est plus rageuse lorsqu’un chef perd véritablement tout le pouvoir avant qu’il ne quitte le palais. A force de diversion sur les réformes, le champion de la rapine électorale a obstrué toutes les voies honorables de sortie et se met en péril en croyant que la provocation et la répression fauve lui donneraient de nouveaux habits d’autorité. Le test de puissance par la violence, les brimades sur des populations sans défense est plutôt l’expression d’une grande faiblesse. La noblesse de l’épée est dans la bravoure, la dignité et l’intelligence à créer l’espérance collective.
La reproduction de l’Etat de siège, du passage à tabac au Nord et particulièrement à Sokodé sont une frange politique éclatée qui creuse davantage le gouffre des petitesses à Faure et à son régime. En politique, la vengeance est le pire des conseillères. Ni les Tem, ni le Togo ne seront affaiblis de ce regain de violence au Nord du pays.
2) Les rebonds de l’histoire sur la vérité des peuples
L’espérance collective est un torrent. Il suit son cours en contournant les collines et montagnes ou en y creusant un tunnel. Il fait un lit et se jette dans les flots en créant d’autres horizons. Le degré de prise de conscience des togolais sur leur avenir, les ruines d’un règne dont ils ne peuvent plus en être esclaves est proprement inextinguible. L’insurrection générale de la conscience citoyenne ne vient pas de Sokodé, de Mango, de Bafilo, du PNP, de l’ANC. Elle surgit d’une diversion récurrente sur les réformes de l’accord Politique Global (APG).
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La politique de bouc-émissaire est une courte vue, une étroitesse d’esprit, une auto déculpabilisation qui procède d’un enlisement dans le crime. Dans La raison dans l’histoire, Hegel nous convainc de ce que l’histoire s’accomplit toujours par une auto détermination des événements eux-mêmes en empruntant des hommes qui supportent son déroulement. L’acharnement du régime contre des zones cibles de représailles, de violence ne saurait escamoter la fin d’un règne ou l’éviter. Le Rpt/Unir suit sa pente imparable en descendant. Son effondrement est inévitable parce que la nature intègre dans toute évolution un cycle. Et pour Hegel dans La Phénoménologie de l’esprit Tome I: « L’oiseau de Minerve s’envole à la tombée de la nuit ».
La nuit est déjà tombée sur la dynastie des GNASSINGBE et sa politique de la terre brûlée est proprement une énergie du désespoir. Le point d’or de vérité de son histoire est dans un futur proche. 2020, c’est après demain. Des œuvres froides de l’histoire se forment et ceux qui savent lire de leur terrasse les grands plans de la nature elle-même sont les météores de la marche du monde.
Les actes insensés, les punitions collectives infligées à des catégories socio-ethniques, à des innocents renforcent la puissance de la détermination de la collectivité nationale. Les cruautés répétées contre une partie du peuple n’abaissent pas la solidarité agissante d’un pays en quête de la libération. Se replier sur la violence et la cruauté comme moyen de défense des usurpateurs est une situation aggravante. Les auteurs et commanditaires des actes de barbarie vont se connaître. De Nurembourg à Banjul en passant par Ouagadougou, nul ne peut éviter de répondre de ses actes.
La belligérance de provocation, les actes belliqueux et déplacés font partie de l’accoutumance d’une volonté de puissance mal inspirée. Dans Mars ou la guerre, Alain nous avertit: « Qui serre toujours serre mal ». Quand les voies de la paix sont tracées, l’ordre de la délinquance à se mettre en travers est une morbidité notoire qui ne peut être traitée sous aucune excuse.
Sokodé, Bafilo, Mango nous appellent et notre citoyenneté n’est pas variable par rapport à l’accident de notre lieu d’origine ou de naissance. De notre engagement, de notre solidarité en tant que peuple unique, ce régime ne sortira pas vainqueur de notre combat. Nous ne sommes pas non plus sûrs que la facilitation et la Communauté sous régionale aient une appréciation détournée sur la récidive de la barbarie et du passage à tabac orchestrés de nouveau contre le Nord. Dans ses Souvenirs, Alexis TOCQUEVILLE nous apprend: « En politique, la communauté des haines fait presque toujours le fond des amitiés ».
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Nous n’avons jamais été aussi proches les uns des autres jusqu’à la diaspora que quand la barbarie fouette notre orgueil patriotique. Quel Togolais n’a pas senti frémir en lui les fibres d’humanité à voir le drame de la lagune de Bè, l’incendie des marchés de Kara et de Lomé… Nous poursuivons notre histoire sur des valeurs civiques, éthiques, morales et de justice. Ensemble, nous gagnerons la bataille des valeurs.
Source: L’Alternative

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