Il est tout de même surprenant que le régime de Faure Gnassingbé, malgré les interventions de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), avec sa feuille de route pour une solution pacifique et durable de la crise, les appels à l’ordre de la société civile togolaise, le message de la Conférence des Evêques du Togo (CET) et autres observateurs de la crise politique, continue de jouer au va-t en guerre. On comprend depuis le début de cette crise que le clan au pouvoir veut régler tout par la force. Il a tout fait pour mettre en difficulté la feuille de route de l’institution communautaire. Le régime RPT/UNIR se montre hostile même aux réformes constitutionnelles dont les textes sont proposés par l’expert constitutionnaliste de la CEDEAO, Alioune Badara Fall.

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Depuis le début de la semaine, on connaît la version finale du rapport de l’expert de la CEDEAO, en vue des réformes constitutionnelles au Togo. Le texte proposé, dans sa version définitive, ne comporte plus de dispositions transitoires qui permettaient à Faure Gnassingbé de briguer un nouveau mandat. Ainsi l’article 59 nouveau stipule : « Le Président de la République est élu au suffrage universel, libre, direct, égal et secret pour un mandat de cinq ans, renouvelable une seule fois. Nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels ou proroger le mandat pour quelque motif que ce soit. Cette disposition ne peut faire l’objet d’aucune révision ». Quant à l’article 60 nouveau, il dispose : « L’élection du Président de la République a lieu au scrutin uninominal majoritaire à deux tours. Le Président de la République est élu à la majorité absolue des suffrages exprimés représentant au moins la majorité des électeurs inscrits. Si celle-ci n’est pas obtenue au premier tour du scrutin, il est procédé le 15e jour après la proclamation des résultats définitifs du premier tour à un second tour. Seuls peuvent se présenter au second tour les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de voix au premier tour. En cas de désistement ou de décès de l’un ou l’autre des deux candidats entre les deux tours, les suivants se présentent dans l’ordre de leur classement. Au second tour, est déclaré élu le candidat qui a obtenu le plus grand nombre de voix ». Et l’article 100 nouveau de disposer : « La Cour constitutionnelle est composée de sept (07) membres nommés pour un mandat de six (06) ans renouvelable une seule fois. Deux (02) sont désignés par le Président de la République dont un (01) en raison de sa compétence et son expérience professionnelle en matière juridique et administrative. Deux (02) sont élus par l’Assemblée nationale à la majorité absolue de ses membres, ils doivent être choisis en raison de leur compétence juridique et en dehors des députés. Un (01) assistant désigné par le Conseil supérieur de la magistrature. Un (01) avocat désigné par ses pairs et ayant au moins quinze (15) ans d’ancienneté et d’une probité reconnue. Un (01) professeur d’université titulaire en droit élu par ses pairs et ayant au moins quinze (15) ans d’ancienneté. Le Président de la Cour constitutionnelle est nommé par le Président de la République ».

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C’est donc ce texte qui a été approuvé par les chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO, ainsi que les Facilitateurs. Dans un communiqué rendu public dimanche dernier, la Commission de la CEDEAO a bien précisé que seul ce texte fait foi et doit être envoyé à l’Assemblée nationale pour étude. « La conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement de la CEDEAO a notamment recommandé l’adoption par la voie parlementaire en vue d’accélérer le processus de leur mise en œuvre, le cas échéant, ces réformes seront soumises aux consultations électorales. En application des termes de références ci-dessous, l’expert constitutionnaliste a préparé un rapport et l’a soumis à la commission. Celle-ci a trouvé le Rapport en conformité avec les décisions du sommet du 31 juillet 2018 et avec la pratique en cours dans les pays de l’Afrique de l’Ouest, conformément au mandat qui lui a été donné par le sommet, ce rapport seul qui fait foi, a été transmis par la Commission aux deux (02) Facilitateurs et aux acteurs togolais », a indiqué la Commission de la CEDEAO dans son communiqué.

Mais visiblement, le régime de Faure Gnassingbé ne se trouve pas dans cette logique. Et il l’a démontré mercredi dernier à l’Assemblée nationale lors de l’étude de ce projet de loi en Commission. « Au début des travaux, les députés de l’opposition ont constaté que le texte soumis à l’examen des députés est un texte élaboré unilatéralement par le gouvernement en dehors du dialogue et qui est une reprise du texte du 5 septembre 2017 qui avait exacerbé la crise politique », ont déploré les députés de l’opposition hier en conférence de presse au siège de la Convention démocratique des peuples africains (CDPA). Devant l’insistance des députés de la majorité de faire passer le texte unilatéral du gouvernement, ceux de l’opposition ont dû se retirer de la salle, « laissant au gouvernement la pleine et entière responsabilité de l’aggravation de la crise politique ». « L’objectif des députés de l’opposition demeurant le règlement définitif de la longue crise que traverse notre pays, ils ne pouvaient dès lors se rendre complices d’un jeu politiquement néfaste en participant à l’étude du projet de loi de révision constitutionnelle unilatéralement concocté par le gouvernement », ont souligné les députés de l’opposition.

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Pour ces derniers, le régime de Faure Gnassingbé n’a jamais accepté la feuille de route de la CEDEAO. C’est pourquoi il crée des situations qui visent à l’enterrer. Seul le peuple togolais, à en croire ces députés, peut mettre fin à tout cela. « Face à ce nouveau coup de force, en leur qualité de mandataires, les députés de l’opposition ont le devoir de rendre compte à leur mandant, le peuple togolais à qui il revient de prendre son destin en main », ont-ils déclaré. La Coalition des 14 partis de l’opposition prévoit d’ailleurs une série de manifestations de rue à partir de la semaine prochaine. Ces manifestations se dérouleront à Lomé, Kpalimé, Atakpamé, Sokodé, Bassar et Dapaong les 29 novembre, 1er, 3 et 4 décembre 2018.

Comme on peut le constater, le régime RPT/UNIR a choisi la voie du chaos. Il se dresse contre toutes tentatives de résolution pacifique de la crise politique. Face à cela, nombreux sont les observateurs qui attendent la réaction de la CEDEAO dont les décisions sont en train d’être foulées aux pieds par Faure Gnassingbé et son pouvoir.

Source : L’Alternative No.755 du 23 novembre 2018

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