La crise politique togolaise consécutive à la succession monarchique au pouvoir de Faure Gnassingbé dans un bain de sang continue de montrer les limites de la CEDEAO, une institution qui apparait de plus en plus comme un syndicat du crime.
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Certains Togolais et observateurs ont cru que cette institution allait saisir l’occasion du rebond de la crise consécutive aux marches du 19 août 2017 pour faire justice au peuple togolais. Ils attendront longtemps car dans les couloirs feutrés d’Abuja où la corruption semble la chose la plus partagée entre fonctionnaires et parfois certains chefs d’Etat, prendre le parti du plus fort ou des bourreaux est beaucoup plus juteux.
Au sein de cette institution, certains chefs d’Etat ou fonctionnaires sont des récidivistes impénitents capables de revenir sur leur lieu de crime pour charger une fois de plus les victimes en dédouanant ostensiblement les bourreaux.
En 2015, à moins d’une heure de la proclamation des faux résultats par la CENI de Taffa Tabiou, Alassane Dramane Ouattara, le président de la Côte d’Ivoire arrivé in extremis à Lomé accompagné de son homologue du Ghana John Mahama s’est permis d’adresser des menaces à peine voilées à un leader politique, lui interdisant carrément d’appeler ses militants à la rue sous peine de poursuite. La suite est connue de tous.
Faure Gnassingbé a été proclamé frauduleusement vainqueur et la CEDEAO n’a pas bronché. Depuis, les évènements du 19 août la CEDEAO s’est invitée dans la crise togolaise par une facilitation tortueuse visant à ménager la chèvre et le chou. Cette complaisance de la CEDEAO vis-à-vis du régime de Lomé a accouchée d’une feuille de route au sommet du 31 juillet à Lomé. Même si elle est en déca des attentes, les populations togolaises espéraient son application rigoureuse en vue d’une sortie définitive de la crise.
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Habitué à ne jamais respecter ses engagements, le pouvoir RPT-UNIR s’évertue depuis le mois de juillet à appliquer cette feuille de route selon ses humeurs, et ceci, sous le regard admiratif de la CEDEAO dont certains fonctionnaires sont soupçonnés de corruption. Alors qu’on attendait que les Chefs d’Etat de la CEDEAO recadrent le pouvoir de Lomé dans sa fuite en avant en faisant une fixation sur la date du 20 décembre, Abuja publie ce 26 novembre un communiqué totalement creux dans lequel il renvoie dos à dos les bourreaux et les victimes. Les termes de ce communiqué ressemblent étrangement aux propos d’Alassane Ouattara en 2015.
«Depuis quelques temps, alors que la CEDEAO s’investit pleinement dans la mise en œuvre des décisions contenues dans la feuille de route adoptée le 31 juillet 2018 par la Conférence des Chefs d’Etat et de gouvernement de l’organisation sous-régionale, des propos et des écrits sont diffusés pour appeler à des initiatives susceptibles de créer le désordre et de susciter la violence au Togo. De tels messages sont de nature à compromettre les efforts qui sont en cours pour mettre fin à la situation difficile que connait le pays. Ils accentuent également l’inquiétude que la persistance de la crise suscite chez les Togolais, les amis et les partenaires du Togo. C’est-à-dire qu’ils vont à l’encontre des intérêts fondamentaux du peuple togolais et de la sous-région.
A ce propos, les facilitateurs et la Commission de la CEDEAO voudraient rappeler qu’aux paragraphes 39 et 40 de la feuille de route du 31 juillet 2018 à laquelle ont souscrit tous les acteurs politiques, la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement à condamner tout recours à la violence et appeler les acteurs politiques et la société civile à s’abstenir, en toute circonstance d’actes et de propos susceptibles d’alimenter de nouvelles tensions et de compromettre les efforts en cours.
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Cette position s’inscrit en droite ligne dans l’esprit et la lettre du protocole de la CEDEAO relatif au mécanisme de prévention, de gestion règlement de conflits, de maintien de la paix et de la sécurité, ainsi de son protocole additionnel sur la démocratie et la bonne gouvernance », peut-on lire dans le communiqué sur fond de mise en garde qui poursuit : « Voilà pourquoi les facilitateurs et la commission de la CEDEAO expriment leur totale désapprobation des propos et écrits susmentionnés.
Au demeurant, ceux-ci vont à l’encontre du souci d’apaisement que la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement a salué chez l’ensemble des acteurs politiques depuis le début de la facilitation entreprise par la CEDEAO. Aussi, les facilitateurs et la Commission voudraient-ils à nouveau lancer un appel pressant à toutes les parties prenantes de la crise pour qu’elles s’abstiennent de recourir à la violence et s’inscrire résolument dans la voix du dialogue et de la concertation pour résoudre leurs différends de manière à promouvoir la culture de la paix dans leur pays pour le bien commun. Ils sollicitent en même temps la collaboration dans ce sens des responsables des organisations de la société civile et des médias. Enfin les Facilitateurs et la Commission de la CEDEAO réaffirment leur ferme détermination à tout mettre en œuvre en vue de l’application de la Feuille de route du 31 juillet 2018 ».
Ce communiqué à la limite est une provocation envers le peuple togolais de la CEDEAO doublée d’une complaisance dans la résolution de la crise. Comment peut-on évoquer un attachement à l’application stricte de la feuille de route sans être capable de rappeler le gouvernement de Faure Gnassingbé à l’ordre. Parlant de la violence, depuis que des militants de l’opposition sont abattus comme des lapins dans les villes de Sokodé, Lomé, Bafilo et Mango et certains poussés à l’exil, personne n’a entendu la CEDEAO appeler ni à la retenue ni à la cessation de ces exactions. Sur la question du protocole additionnel sur la bonne gouvernance, le Togo est le seul pays de la région à refuser de signer ce document.
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Personne à Abuja n’a brandi la moindre menace contre le régime de Lomé. Cette démarche de la CEDEAO via ce communiqué pour une institution qui a cautionné le massacre de plus de 1000 Togolais en 2005 relève de l’irresponsabilité.
Du reste, les Togolais savent ce qu’ils doivent faire à l’instar des Burkinabè qui ont dit ouvertement non à la CEDEAO, poussant Blaise Compaoré à prendre ses jambes au cou. Le Togo, pour l’honneur de ses populations, ne peut pas continuer à être une anomalie en Afrique de l’Ouest. La CEDEAO, on l’aura compris, est devenue un machin en soutien au régime de Lomé, il ne sert donc à rien d’attendre quoi que ce soit de cette organisation.
Source:L’Alternative

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