Le premier mérite d’un homme politique est de démêler nettement ce qui est possible et ce qui ne l’est pas », Victor Cherbuliez. Faire des promesses sans les honorer et donner l’impression qu’on n’avait pas mesuré tous les contours avant de les prononcer, ce n’est pas bien, surtout quand on est président de la République.

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Lorsque  cela devient redondant, on perd en estime. C’est ce qui semble arrivé à Faure Gnassingbé. Arrivé au pouvoir en 2005, il a fait et refait des promesses aux populations. Mais, on se rend finalement compte qu’à l’heure du bilan, toutes les promesses ne sont pas tenues.

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Et lorsqu’il a prêté serment le dimanche dernier pour son 4e mandat, nombre de Togolais se sont demandé ce qu’il nous réserve cette fois-ci.

 Un mandat de réconciliation manquée

 Quand il est arrivé à la Présidence en 2005, Faure Gnassingbé a placé son mandat sous le signe de la paix et de la réconciliation nationale. Certes, il a réussi à instaurer la paix dans le pays avec la signature de l’Accord Politique Global en 2006 et l’organisation des législatives pacifiques en 2007.

Il a aussi rendu l’école primaire gratuite, entrepris la construction des routes et une légère amélioration des conditions de vie et de travail avec l’augmentation du Salaire Minimum Garanti (SMIG) à 35 000 F CFA. Mais il n’a pas pu aller loin. Tout allait bien quand en 2009, une lugubre affaire d’atteinte à la sûreté de l’Etat surgit.

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Dans la foulée, son demi-frère, Kpatcha Gnassingbé, est indexé et jeté en prison pour 20 ans. Malgré les appels à l’indulgence émis par les uns et les autres, il est resté campé sur sa position. La réconciliation qu’il a tant prônée est étouffée dans l’œuf par cette affaire.

Sa famille biologique et politique et tout le pays se retrouvent ainsi plus divisés que par le passé. On en était là quand il brigua son 2e mandat en 2010.

Qu’en est-il du2e mandat ?

Pour avoir ce 2e mandat, il a promis la relance de l’économie et le développement des infrastructures aux populations. Oui, des routes, sont construites. L’aéroport de Lomé est rénové.

Des écoles et centres de santé sont construits. Un Fonds National de Finance Inclusive (FNFI) est lancé en 2014 pour permettre aux couches vulnérables de créer des activités génératrices de revenus. Selon la Banque Mondiale, le taux national de pauvreté a reculé de près de 6 points, passant de 61,7% en 2006 à 55,1% en 2015.

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L’agriculture est relancée. Plusieurs marchés modernes sont construits pour redynamiser le commerce. Mais ici encore, le chef de l’Etat n’est pas allé au bout de ses promesses. Au lendemain des manifestations de l’opposition et de la société civile regroupées dans le Collectif Sauvons le Togo, deux grands marchés du Togo, notamment celui de Kara et celui de Lomé ont pris feu en 2013.

Quelle horreur ! Ce drame dans lequel des membres de l’opposition sont accusés et emprisonnés, a entraîné l’économie nationale dans une récession sans précédent. Au lieu de la relance économique promise, le pays a plutôt eu droit à une régression économique.

Un peu partout, c’est le désarroi, la misère généralisée ! Lorsque l’année 2015 était à terme, la pauvreté reprit sa courbe ascendante, « surtout dans les zones rurales où 69% des ménages vivaient en dessous du seuil de la pauvreté », indiquait la Banque Mondiale.

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Conscient de cet état misérable et miséreux des populations, Faure Gnassingbé leur a, pendant la campagne présidentielle de 2015, dit qu’il placerait son 3e mandat sous le sceau du social. Un 3e mandat très mitigé Ironie du sort, c’est au cours de ce 3e mandat dit social que la pauvreté est devenue endémique.

Bien sûr, le recrutement des fonctionnaires et la construction des infrastructures se sont poursuivis. Mieux, le FNFI a intensifié sa couverture.

Mais les montants prêtés par ce fonds ne tournent qu’autour de 30 000 francs CFA par personne. Ce qui n’a pas pu permettre à la plupart des bénéficiaires de s’en sortir à cause de la vie chère. Par la suite, le Mécanisme Incitatif de Financement Agricole (MIFA) est créé en 2018 pour le décollage de l’agriculture.

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Une initiative louable mais qui peine à changer la donne à cause du climat politique délétère qui a pris place dans le pays depuis le 19 août 2017. Les Togolais sont de nouveau sortis dans les rues pour réclamer les réformes et le dé- part du régime.

La répression qui a suivi ces manifestations étalées sur plusieurs semaines a tout chamboulé. Sans verser dans l’hyperbole, on peut dire que le social n’était plus le premier souci du chef de l’Etat. Son pouvoir étant menacé pour des raisons de réformes politiques, électorales, institutionnelles et constitutionnelles, il a dû redéfinir ses priorités.

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Très vite la constitution est modifiée par l’Assemblée nationale le 15 mai 2019 pour limiter le nombre de mandats présidentiels à deux et fixer le mode de scrutin à deux tours. Mais comme le texte n’est pas rétroactif, les tensions demeurent palpables. le noble Plan National de Développement (PND) adopté en 2018 aussi a pris un coup dur.

Que nous réserve le 4e mandat ?

Pour ce 4e mandat, le chef de l’Etat a promis cinq choses. On a la préservation de la paix et de la sécurité, la gouvernance concrète, la création de richesses pour plus de prospérité partagée et des conditions de vies dignes et épanouissantes pour tous, le renforcement du capital humain à travers l’éducation et la santé pour tous et l’accès universel aux services sociaux de base.

Cette fois-ci, nous osons croire qu’il ira jusqu’au bout. A en croire le ministre Bawara, ce nouveau quinquennat va tenir toutes ses promesses. Mais nous ne sommes pas naïfs.

Faure Gnassingbé est avant tout un homme politique. Ce n’est pas l’écrivain Charles Pasqua qui va nous démentir. Déjà en son temps, il disait que « les promesses des hommes politiques n’engagent que ceux qui les reçoivent ». Mieux, dans notre pays le professeur Léopold Gnininvi a fait observer dans les années 1990 que « les promesses n’engagent que ceux qui y croient ».

En tout état de cause, Faure Gnassingbé va présider aux destinées du pays jusqu’en 2025. On ne sait pas s’il va encore postuler ou pas. Mais s’il y a une chose que les Togolais lui demandent, c’est qu’il tienne ses promesses de ce 4e quinquennat. Et cela ne peut se concrétiser sans un climat politique apaisé.

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Puisque ce sont les problèmes politiques qui ont fait entorse aux trois premiers mandats. Mais déjà l’affaire Agbéyomé Kodjo et la pandémie du coronavirus font poser beaucoup de questions quant à la sérénité du nouveau mandat ; sans oublier les détenus du Parti National Panafricain (PNP) et son frère Kpatcha.

La Dépêche

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