« Le chef est toujours seul face au mauvais destin ». Dans ses Mémoires de guerre, Charles de GAULLE insiste sur la qualité du flair du leader, son sens de l’anticipation, le génie politique qui doit animer sa conscience, la générosité de l’intelligence dans ses choix, la qualité de l’action qu’il doit constamment mener, le sens de l’honneur qu’il intègre dans les actes de grandeur, l’élévation de l’âme pour tricoter une exemplarité incarnée. Si ce cocktail de dispositions heureuses venait à manquer au chef, il s’expose à l’humiliation, à la faillite de son autorité pour œuvrer à sa propre perte.
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Dans sa chapelle du déni, du faux et des effractions, l’héritier dynastique du « Timonier » n’a d’affirmation que la brutalité et le parjure. Partout, il jure sur les réformes de l’Accord Politique Global de 2006 sans oser les mettre à exécution. Ni l’Accord politique avec ce qui reste de l’UFC, ni les Recommandations de la CVJR ne lui sont jamais apparus comme un fouet de sa conscience pour une normalité de la gouvernance pour asseoir la concorde civile et un sursaut de réconciliation.
L’enfermement dans les ruines des rêveries solitaires pour une éternité au pouvoir a explosé une insurrection populaire qui échappe à l’étreinte de la répression. La grille d’interprétation de ce réveil massif, incisif contre le règne du « Timoniertricule » l’a contraint à comprendre la rage d’un peuple qui exigeait son départ. La sollicitation de la CEDEAO par le fils héritier pour ouvrir les portes de la négociation avec des facilitateurs s’est vite révélée comme une prise en main de la question togolaise par l’Organisation sous régionale qui, du reste, treize (13) ans plutôt lui avait prêté les escaliers pour son fauteuil.
Le sens de l’aval communautaire à la succession dynastique au Togo est travesti et les normes de la gouvernance, de l’alternance politique font partie du protocole additionnel de la CEDEAO. Le règne de Faure est tombé en désuétude à partir de l’inventaire des normalités politiques dans l’espace CEDEAO. Il faut donc trouver un accompagnement d’évacuation de l’exception moribonde du Togo, parce que les citoyens en font une priorité de combat populaire et la CEDEAO a un devoir de rachat face au supplice de la répression fauve qui est le socle de résistance du prince.
L’esprit de notre époque, les contingences du moment, les aspirations fortes du peuple, l’histoire dans son déroulement inexorable répondent aux exigences légitimes formulées par des citoyens qui connaissent leurs droits et sont solidaires pour les réclamer.
Comment Faure peut-il encore s’opposer à son peuple, à ses attentes après des promesses non tenues, des accords chiffonnés, des trahisons crues et refouler les ordonnances de la puissance régionale avec une chimère de tirer son épingle du jeu ?
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1) Le temps du principe de réalité
La stratégie de Faure GNASSINGBE, après avoir obtenu la suspension des manifestations gigantesques de l’Opposition par le biais de la sollicitation de la CEDEAO, c’est de contourner la feuille de route de l’Organisation sous-régionale, de mettre en suspension toutes les réformes institutionnelles, constitutionnelles et électorales en précipitant les législatives au prétexte que la date du 20 décembre est fétiche. La préoccupation du prince est de « nommer » par une falsification de l’Opposition ceux qui vont l’aider à noyer les réformes par le couvert d’une Assemblée fantoche pour donner un corpus légal à la forfaiture
Ainsi, la CEDEAO se serait coincée et sa proposition de loi pour une révision constitutionnelle tomberait ipso facto à l’eau. Alioune Badara FALL a été commis par la CEDEAO pour une proposition de texte de révision constitutionnelle qui deviendrait caduque à l’instar des contrats et consensus acquis, ou des conclusions de dialogues.
La stratégie de refoulement de la CEDEAO et de sa proposition de révision constitutionnelle qui précise que nul ne peut faire plus de deux mandats ni le proroger et que ces dispositions ne peuvent faire l’objet d’une révision constitutionnelle, est à l’œuvre. Mais elle ne peut pas aboutir pour deux raisons.

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  • La Coalition des quatorze partis politiques a compris vite le manège et s’est désolidarisée d’un accompagnement forcé orchestré par le pouvoir en violation de la feuille de route. L’ampleur de la reprise de la mobilisation citoyenne oblige la CEDEAO à un sursaut pour faire valoir sa crédibilité. L’espace communautaire doit comprendre que la rétention volontaire des réformes par le régime togolais est un manège pour les reléguer au mandat d’une autre Assemblée traficotée qui sortirait d’une élection tronquée susceptible de renverser tout.

  • En outre, la CEDEAO est dans la contrainte d’un recadrage sur sa feuille de route. La puissance de la contestation populaire est incisive. Elle n’est pas prête à faiblir au regard de sa force ascendante sur toute l’étendue du territoire et dans la diaspora. La résistance flambée à l’Assemblée nationale du côté de l’opposition et l’agitation des pavés conjuguées élèvent une muraille contre l’imposture que, du reste, voyaient venir la conférence des Evêques du Togo (CET), l’Eglise protestante et les imams du Togo.

Le RPT/UNIR veut gagner du temps pour falsifier les réformes, maintenir le statu quo avec la bénédiction d’une Assemblée taillée sur mesure. L’objectif de la manœuvre est de chasser les contestataires de l’hémicycle pour se donner les coudées franches d’une évolution tranquille du statu quo.
Le professeur Alioune Badara FALL a travaillé à partir des termes de références ordonnés par la CEDEAO, combinés avec les réalités de notre pays. L’organisation sous-régionale veut visiblement éviter la répétition du cas Yahya JAMMEH dans la zone et s’offre des gants pour réaliser ce qui s’est déjà passé en Gambie sans recourir aux armes. La CEDEAO a pleinement conscience qu’elle n’a aucun intérêt à faire du Togo une exception de son protocole additionnel sur l’alternance politique et la gouvernance.
Il y a une éthique politique bien affichée par la Cedeao dans le travail qu’elle a demandé au professeur FALL. Il lui sera très difficile de se rebiffer ou de renoncer à l’exigence des réformes constitutionnelles, institutionnelles avant les législatives. La volonté exprimée par la CEDEAO sur l’alternance politique au Togo est claire et nette parce que le texte sur commande produit par le Professeur FALL a été lu, certifié par la puissance sous-régionale, les leaders, le président de la commission de la CEDEAO avant qu’il ne soit envoyé aux parties prenantes du conflit. Sur ses propres ordonnances, l’organisation sous-régionale ne peut pas continuer à cultiver le malaise, à laisser le régime dynastique sur un registre exceptionnel et l’aider à toutes les transgressions des normes de gouvernance qu’elle s’est elle-même donné.
Le fumet du ridicule éclabousserait tous ceux qui font office de leaders dans l’espace CEDEAO qui, de leurs glissades sur la gestion de la feuille de route, se retrouvent déjà dans une position indéfendable. Le peuple Togolais est dans son devoir de contraindre la CEDEAO à un rachat par sa détermination, son engagement incisif et motivé. Pour peu que nous veillions être nous-mêmes dans nos revendications, dans nos exigences de respect scrupuleux de la feuille de route, nous réussirons à mettre en situation d’hors-jeu les faux-monnayeurs de la démocratie et de l’alternance politique qui n’ont aucune voix populaire et qui sautent sur les législatives biaisées dans une traîtrise monstre du combat pour l’alternance au Togo.
Par notre foi et par l’expérience acquise dans la lutte populaire, nous répétons après NAPOLEON 1er, dans sa Lettre à Alexandre 1er , le 02 février, 1808; « Les hommes qui ont changé l’univers n’y sont jamais parvenus en gagnant des chefs; mais toujours en remuant des masses ». La conscience nationale est déjà en éveil sur les attentes des vingt huit ans de lutte; il appartient à la C14 de la chauffer davantage pour des résultats probants.
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2) L’impossible récidive de la trahison
Le stade de rebond de la conscience collective sur les exigences d’une alternance politique interdit tout soupçon de recul et de résignation nationale sur le sujet. Quels que soient les subterfuges, les manèges, les alibis, les manœuvres pour échapper à l’évidence, la conscience éclatée dans l’âme de ce peuple si folle sur la question du changement et de l’alternance démocratique qu’elle ne peut se résoudre aux absurdités de contournement dont s’autorise le « simplisme politique » de « l’homme simple».
Le schéma de 2005 pour un embarquement heurté aux fins d’une rapine électorale n’aura jamais sa réplique en 2018 ni en 2020. L’expérience acquise de l’imposture qui a perché des crimes ordonne le peuple à un cran de vigilance et de résistance qui change tous les plans des usurpateurs. Le brigandage électoral au mépris de toutes les ordonnances communautaires est une vue de l’esprit. L’entreprise est aujourd’hui plus périlleuse pour le clan GNASSINGBE qu’il ne le croit.
L’Opposition s’est auto-régulée et débarrassée de ses souillures. Elle a pris une dimension plus synchronisée et totalement étoffée d’une solidarité diagonale, cirée d’une jouvence de jeunesse en lutte frontale avec le régime. Elle s’est durcie à l’épreuve de la résistance qui ne laisse aucune chance au régime de sortir encore indemne d’une pagaille électorale.
Les époques ne sont jamais les mêmes. La dynamique sociale est sur sa pente ascendante pour l’alternance politique et ne peut encore céder le passage à une parodie électorale couverte d’une brutalité militaire.
D’un autre côté, la CEDEAO a beau jouer à l’inertie, elle finira par se réveiller face à l’adversité populaire. Le texte de révision constitutionnelle qu’elle a soumis à l’Assemblée nationale est le moindre mal pour la restauration d’un État démocratique apaisé. Le champion RPT/UNIR n’en veut visiblement pas. Si Faure est incapable de se redresser pour grandir et sortir par le haut de cette crise conformément aux engagements de la CEDEAO, c’est qu’il met au défi cette institution et le peuple togolais en comptant sur ses armes. Les excentricités ridicules ont leur prix démoniaque. Comment peut-il espérer le gain d’un combat contre tout un peuple et contre toute la puissance communautaire?
NAPOLÉON 1er dans sa Lettre à Alexandre 1er nous apprend: « La haute politique n’est que le bon sens appliqué aux grandes choses ». C’est à nous, peuple togolais, d’affirmer ce que nous voulons, de choisir le combat pour sortir de l’esclavagisme d’un clan, d’une famille. Il suffit que nous acceptions de vrais sacrifices pour réécrire notre propre histoire, réinventer la République de nos rêves et la CEDEAO nous suivra. Le souffle de notre folie combative ne doit à aucun moment être distendu dans cet engagement moral, civique; nous gagnerons et vaincrons la dynastie des usurpateurs. La CEDEAO, nous le savons, est lourdement redevable au peuple togolais dans la situation d’aujourd’hui. Sa mollesse ne se comprend pas au Togo ni par les Gambiens, ni par les peuples d’Afrique.
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Le levain de solidarité dans la mobilisation du Nord au Sud, d’Est à l’Ouest est une force de frappe qu’aucune armée ne peut contenir. Debout, le front haut, notre victoire est certaine!
Source: L’Alternative

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